Des nouvelles ! (Première partie)

Je sais que cela fait un moment que je n’ai pas donné de nouvelles ici. J’avais commencé à écrire un article sur mes péripéties de début d’année mais je ne sais pas, j’avais du mal à le finir. En plus, je ne voulais pas seulement raconter ma vie, parce que bon, même si ça me fait rire de vous raconter mes aventures, j’aime bien qu’il y ait aussi des réflexions derrière. Et ce sont ces parties-là que je n’arrivais pas à développer. A la place j’ai préféré partir dans mon cottage dans les montagnes, me balader, couper du bois, monter des cloisons, me battre avec des ronces et rester des heures sur ma terrasse face aux montagnes à écouter le chant des oiseaux. Bref, on s’en fout, prenez un café et on y va !

Alors que tout le monde tombait sous le charme du dernier virus à la mode, mon corps a préféré un prétendant plus « vieux jeu » et assez collant : l’eczéma !

Ces tâches rouges qui apparaissaient sur mon corps m’ont un peu fait paniquer au début. Je m’inquiétais de ce qu’allaient penser mes prétendants. Vous pourriez me dire « C’est juste un eczéma Louise, pas de quoi faire un foin, y’a pire ». Certes, mais laissez-moi vous conter 2 petites histoires qui me sont arrivées il y a quelques années.

A une époque, je faisais de la Pole Dance et pour ceux qui ne le savent pas, avec cette activité on se couvre de bleus (et on s’arrache la peau aussi, on se fait des fractures, des entorses, des trauma crâniens, etc. bref, ce n’est pas juste « se trémousser autour d’une barre »). J’ai la peau fine et blanche donc autant vous dire que je n’étais vraiment pas épargnée par les marques. Il y a eu un entrainement assez violent : beaucoup de chutes, peau arrachée sous le bras et à l’intérieur des cuisses, brulures des genoux… On aurait dit que je sortais d’un match de catch contre un raton-laveur cocaïné. J’avais une rencontre 2 jours plus tard, et je m’étais dit que cela ne poserait pas vraiment problème, ça me faisait rire même. Le jour J j’ai donc informé la personne qu’il allait être normal de découvrir des bleus sur mon corps, que je faisais de la pole dance. Seulement, alors que moi je riais en racontant mes maladresses et mes chutes, j’ai vu que cela ne faisait pas vraiment rire mon partenaire, au contraire. Je ne comprenais pas vraiment le souci, était-ce parce qu’il ne trouvait pas ça « joli » ? Non, pas du tout, en réalité il pensait que je mentais, que j’étais dans un réseau ou en tout cas victime de violences et que je tentais de masquer ça en prétextant faire de la Pole Dance.

Plus ou moins vers la même époque, j’ai vu naitre une petite tâche rouge-violet dans mon cou. Je n’y ai pas prêté attention au début, je pensais que c’était juste une réaction allergique, mais je me suis rendue compte qu’elle grossissait un peu plus chaque jour. J’ai fini par aller voir mon médecin qui m’a posé je-ne-sais-plus quel diagnostic et m’a simplement dit « tant que vous ne cesserez pas de stresser, cela continuera à grossir », le tout en me montrant dans un bouquin de dermato la photo d’une femme dont la tâche allait du bas du ventre jusqu’au visage. Merci docteur, je ne vais pas DU TOUT stresser avec cette image en tête. C’est sûr que c’était chiant car même si ça ne me démangeait pas beaucoup, cela commençait à poser problème dans mon activité. Je voyais des regards un peu effrayés, j’avais des questions sur ma santé générale, bref ça ne m’aidait pas à ne pas stresser. Elle a fini par disparaitre après plusieurs semaines et je ne jamais vraiment su ce que c’était.

Même si j’étais au courant des stéréotypes entourant mon activité, ces deux évènements m’ont fait violemment prendre conscience de leurs impacts dans ma vie professionnelle. En tant que TDS notre santé est scrutée et le moindre petit truc va être interprété, souvent en lien avec ses stéréotypes.

On maigrit ? On est sûrement malade ou dépressive ou anorexique ou je-ne-sais-quoi… Rappelez-vous du commentaire disant « j’espère qu’elle n’est pas malade »

On a des bleus ? Ohlala elle est sûrement dans un réseau, elle a un proxénète, elle a des clients violents… Alors qu’on peut juste faire de la pole ou kiffer les soirées BDSM ou être super maladroite.

On a des problèmes dermato ? C’est sûr y’a une IST derrière ça ! J’ai lu des mecs dire que les petits boutons au pubis liés aux poils incarnés étaient des IST, vous pensez bien qu’une tâche de 10 cm au cou c’est l’hyperventilation assurée pour ce genre de personne.

Bref, je pourrais vous dérouler encore la liste mais je pense que vous avez compris : à partir du moment où on est TDS, notre santé, notre corps et tout ce qui s’y passe ne nous appartient plus vraiment. On se permet de faire des suppositions, de faire des affirmations et au final faire des accusations qui peuvent être dramatiques. Il est vrai que nous ne sommes pas la seule profession exposée aux remarques sur le physique, regardez simplement les journaux people, vous verrez de nombreuses suppositions dès qu’une personne apparait amaigrie, cernée, fatiguée, etc. Seulement, dans leur cas cela fait vendre des magazines, alors que dans notre cas, on se sert de ces idées reçues pour faire des lois de merde, pour nous imposer certaines choses notamment dans le médical (pour certains soignants, le consentement du patient quand on est TDS ça passe totalement à la trappe car ils savent mieux que nous ce qui est bon et ils agissent pour le bien de tous). Depuis la nuit des temps, nous sommes accusées de répandre les maladies (et de causer la déchéance de la société aussi mais c’est un autre sujet, plus moral). Ces stéréotypes ont justifié le système réglementaristes (maisons closes) en France à une époque et toujours en vigueurs dans certains pays (Allemagne, Suisse, Pays-Bas, etc.) mais aussi des chasses aux TDS dans d’autres pays, des violences, des menaces, etc.

Même si mes craintes n’étaient pas liées à des choses graves à mon encontre, mon stress lié à l’eczéma ne venait pas de nulle part (et il n’arrangeait clairement pas les choses au passage). Je sais comment les gens peuvent réagir face à cela (j’ai même une grosse partie de mon mémoire à propos de l’impact des stéréotypes sur la vie des TDS) et j’étais un peu fatiguée à l’avance de devoir me battre, encore, contre ça. J’étais déjà bien occupée à faire connaissance avec mon eczéma et à le considérer comme un compagnon de voyage temporaire (oui, j’ai tenté la technique du « accepte-le plutôt que de le rejeter et peut-être qu’il partira de lui-même », ce n’est pas une franche réussite mais bon).

(accessoirement, je ne sais pas pourquoi mais cet article est bourré de passages entre parenthèses, vous m’excuserez, c’est peut-être un effet secondaire de l’eczéma)

Cependant, j’ai rapidement réalisé que les relations que j’avais nouées ces dernières années étaient bien différentes de celles de l’époque de l’épisode de la Pole et de la tâche dans le cou (attention, je ne dis pas que tout le monde s’est mal comporté avec moi à cette époque, je dis juste que j’ai eu droit à un peu tout). Tout le monde a joyeusement accepté mon compagnon de route et je peux vous dire que nous avons été dorlotés comme jamais ! Une personne a dévalisé une pharmacie afin de nous offrir plein de produits adaptés, on nous a emmenés au restaurant, on nous a baladés à Paris et à Toulouse, on nous a offert tout un tas de bonnes choses à boire et à manger, on nous a caressés, câlinés, massés, embrassés…

Depuis, il vient, il repart, il revient un peu puis re-disparait, c’est un peu comme un chat : il n’arrive pas à se décider et casse les pieds avec ses aller-retours mais je m’y habitue. En même temps, je ne peux pas le blâmer vu comment nous avons été chouchoutés ces derniers temps, moi aussi ça me donnerait envie de revenir.

Évidemment, cette cohabitation forcée m’a aussi fait penser à toutes les personnes que je rencontre qui ont des soucis de peau qui les freine dans leur vie intime, qui peut même les rendre honteux de se mettre nu devant celle qu’ils courtisent/aiment. Même si mon problème dermatologique est récent et pas trop envahissant, je peux comprendre à quel point cela peut être dur de devoir le vivre dans le quotidien et à quel point cela peut impacter le moral. Sachez donc qu’avec moi ce ne sera pas un problème, on peut en discuter avant si cela vous rassure ou si vous avez des demandes particulières à ce propos. Et puis ainsi, mon eczéma aura un copain du jeu !  

Histoire de ne pas vous épuiser, j’ai décidé de séparer mon post en 2 parties. Dans la prochaine, on continue à suivre mes aventures avec mon eczéma (spoiler : il s’est fait des amis) !

Je vous embrasse